Andruet : Pilote de l'impossible

De tous les pilotes, Jean-Claude Andruet est un des plus fascinants. Des surdoués comme Jean Pierre Nicolas, ça court pas les rues. Probablement Bernard Darniche ou Jean Luc Thérier en sont-ils aussi. Tous des pilotes capables de faire toutes les acrobaties imaginables, presque sans effort.

Lire la suite...
 

Dernières Nouvelles

Sous l'impulsion de Christian Blois et du FAR, la société Russenberger lance une dernière fabrication d'interrupteurs pour Alpine A310 L4 et V6 et Alpine A110 1600 SX dernière version. 

Lire la suite...
 

English - Français ?

Galeries sur AR

15E752F62FAD-34.jpg

Miniatures sur le FAR

miniatures_005.jpg
Accueil arrow Magazine arrow Histoire arrow Rallye du Maroc 1974
Rallye du Maroc 1974 Version imprimable Suggérer par mail
Écrit par Le Tahitien - Geoffroy de Warren   
11-03-2007

Après nous avoir présenté le récit de sa participation au Rallye du Maroc 1973, Le Tahitien nous raconte maintenant sa particpation l'année suivante au même rallye et avec cette fois, une Alpine A110 1600S Groupe IV. Le Tahitien était alors copiloté par Geoffory. de Warren.

Vous remarquerez qu'à l'époque, l'entraide entre coéquipiers n'était pas un vainc mot. Un grand merci au Tahitien de partager avec nous ce nouveau récit !

"Après un nouveau titre de Champion du Maroc des Rallyes et la bonne performance au rallye du Maroc 1973 au volant de la Renault 12 Gordini Usine, malgré un abandon à 200 km de l’arrivée, alors que nous étions septième, sur rupture de la carrosserie au niveau des suspensions avants, Jacques Cheinisse m’a renouvelé sa confiance en me proposant de partir au volant de la berlinette ayant servi de mulet à Jean-Pierre Nicolas et remis en état après les reconnaissances.

Le budget est partiellement bouclé grâce à Renault Maroc et seize concessionnaires , Elf Afriquia, Team RCS accessoires auto, NCR, Hôtel Casablanca, Bouchardon outillages, Vins Doumi, De Carbon, Cibié, Michelin et Ferodo. Je bénéficierais de l’assistance mécanique et pneus de l’équipe Alpine.

Les reconnaissances seront limitées aux nouvelles spéciales, pour les autres, j’utiliserais les notes de l’année dernière, ce n’est pas l’idéal mais le temps et le budget sont comptés, il faudra faire avec et improviser dans les secteurs qui ont été touchés par les inondations et les inévitables détériorations des pistes.

C’est avec impatience que je passe régulièrement au garage ou est basé l’équipe Alpine Renault en espérant trouver les voitures de retour, elles ne reviendrons que l’avant veille du départ ! Je commençais à m’inquiéter. Heureusement les mulets n’ont apparemment pas trop soufferts.

Après un bon lavage et un gros dépoussiérage, les mécanos procèdent aux travaux de remise en état et nous montons l’interphone, le tripmaster, le chrono, les supports de casques ect… et nous stickons les sponsors, la berlinette est trop petite pour recevoir tous les autocollants.

Au parc fermé de Casablanca, du beau monde avec Darniche, Nicolas, Bochnicek et Ambrosino sur Alpine 1800 et 1600, Piot et Thérier sur Renault 17 Gordini et une pléiade de bons pilotes internationaux et locaux ayant déjà participés au rallye du Maroc.

Première étape : Rabat > Fez 801 km dont 195 km de spéciales.

ES 1 El Khatouat

95 km de bonne piste avec beaucoup de virages dans les arbres, scratch Darniche, 5ème temps, tout se passe bien, la berlinette est un vrai plaisir à conduire, le moteur Mignotet a un couple fabuleux et je ne dépasse pas les 4500 t/mn . Abandon d’Ambrosino.

ES 2 Col du Zégota

30 km de goudron très rapide, scratch Darniche, 3ème temps, le moral est au beau fixe. Abandon de Darniche sur le routier après la spéciale sur rupture du couple conique, il a déjà cassé un boîte pendant les reconnaissances !!!

ES 3 Bab Berred

40 km de route de montagne, scratch Nicolas, 4ème temps.

ES 4 Souk El Had

30 km de route de montagne, scratch Nicolas, 19ème temps à la suite d’une crevaison à l’arrière à quelques km de l’arrivée, nous perdons 3’30 pour changer la roue, on n’a pas traîné, ni avant ni après la crevaison. Cet incident nous fait perdre un place, nous sommes 5ème au classement général à Fez.

A l’assistance nous constatons que l’avant de Berlinette est anormalement bas, les ressorts sont affaissés à la suite des reconnaissances et les mécanos n’ont pas le temps de les remplacer (n’oublions pas que nous passons après les quatre équipages officiels)

Deuxième étape Fez > Marrakech 1018 km dont 380 km de spéciales.

Les pluies des dernières semaines ont gonflé les oueds et en traversant un oued particulièrement vigoureux, j’ai la désagréable surprise de constater que la berlinette flotte et dérive avec le courrant , heureusement elle continue a progresser et nous regagnons l’autre rive un peu en décalage avec la sortie prévue, drôle d’impression, ont est quitte pour vider l’eau qui s’est infiltré dans l’habitacle.

ES 5 Missour > Meski

175 km de piste difficile en raison des cailloux et séguias qui jalonnent le terrain, scratch PIOT, 3 ème temps, sans attaquer car la suspension avant talonne et le souvenir de la R12 Gordini, m’incite a lever le pied, Turcot sur berlinette qui part 3’ derrière moi me double au bout de 30 km !!! Au diable l’amour propre il faut ASSURER … Les événements me donnent raison, 20 km plus loin Turcot est en train de mécaniquer sur le bord de la piste…Il faut cependant passer les séguias à l’accélération car la berlinette a une garde au sol très faible, comparé à beaucoup d’autres véhicules, heureusement le carénage est efficace.
La technique de franchissement des séguias de 50 cm à un 1 m est la suivante : Freiner fort avant le trou et relâcher 2 m avant en accélérant à fond pour sauter l’obstacle, il n’y a pas intérêt à ce tromper sinon le train avant risque gros.

A la sortie de la spéciale je m’arrête à l’assistance volante pour savoir si ils ont des ressorts avants, car la berlinette traîne littéralement par terre, coup de chance, il y en a deux ainsi que des fusées et des amortisseurs, top là, je décide de les changer avant d’arriver à Marrakech, l’année dernière nous avons pris 9’ de pénalité, car nous passons après les voitures officielles.

 

ES 6 Rich > Tizi N’Isly

205 km de piste lente de fond d’oued, beaucoup de virages et de radiers, scratch Thérier, 5 ème temps, la piste est très cassante et je lâche le pied dans les portions difficiles.
A l’assistance, il y a la queue, échange des amortisseurs arrières et petit entretien, filtres, plaquettes ect... L’arrivée au parc fermé qui se trouve à plus d’un km en traversant la ville est épique, malgré ma vélocité, nous pointons avec quelques secondes de retard, bilan une minute de pénalité, heureusement que nous avons changé les ressorts à la sortie de Meski. Nous terminons l’étape 5 ème au général.

Troisième étape Marrakech > Marrakech 881 km dont 379 km de spéciales.

ES 7 Tizi N’Test

87 km goudron et piste en montagne, beaucoup de virages avec « vue » sur des précipices impressionnants (Jean françois Piot y perdra la vie a la suite d’une sortie de route quelques années plus tard ), scratch Nicolas, 3 ème temps. Abandon de Bochnicek sur casse du train avant.

ES 8 Irhrem > Tata > Foum Zguid

200 km de piste très difficile sur les 40 premiers km effectués en 1 heure et ensuite rapide avec des radiers, scratch Nicolas, 3 ème temps malgré une crevaison dans les circonstances suivantes : A la sortie de Tata, une piste très large sur laquelle la berlinette flirte avec les 180 km/h, plusieurs « hauts de côte », ils sont plus nombreux dans la berlinette par rapport à nos notes (faite avec une Renault 16) because la position de conduite semi-allongée.

 

Donc mon coéquipier Geoffroy, ancien de la légion, m’annonce à plusieurs reprises « haute de côte pour gauche 50 au radier », l’année dernière S Metha Nissan 240 Z s’est sorti méchamment dans le radier en question, une fois, deux fois je ralenti pour rien, Geoffroy croit s’être trompé dans le remise à zéro, persuadé d’avoir recalé le tripmaster, il m’annonce un haut de côte à fond …130 / 140 km/h….et là panique à bord le fameux gauche et son radier sont là, dans un reflex de survie, freinage à mort, la voiture part en travers et pour moi le rallye s’arrête dans le rocher « Metha » heureusement la berlinette est plus légère et par instinct de « survie » je remet la sauce, elle vient s’appuyer sur de la gravette et rebondit de l’autre coté de la piste et par « miracle » se retrouve en ligne dans le radier, quelques centaines de mètres plus loin çà ne roule plus très rond, je m’arrête persuadé que les dégâts sont importants…bilan visible, la roue arrière droite éclatée, par contre Geoffroy n’a pas digéré l’événement, il reste dans la berlinette un peu groggy, il faut que je le rudoies un peu pour qu’il m’aide a changer la roue, je repars en espérant que les roulements vont tenir le coup, il mettra plusieurs km avant de reprendre le cours normal des notes. Pour l’anecdote Geoffroy mesure 2 m et il est littéralement plié en 3 dans l’habitacle pendant les 4000 km du rallye, avec un arbre de roue sous les jambes, chapeau…Abandon de JF Piot qui était 2 ème à 3 secondes de Nicolas, il casse la suspension avant à peu près au même endroit que son abandon l’année dernière pour le même motif, vous avez dit scoumoune ?

ES 9 Tazenakht

92 km de piste rapide, scratch Nicolas, 3 ème temps, tout va bien le « gauche 50 au radier » n’est plus qu’un mauvais souvenir. Nous terminons l’étape à la 3 ème place du général.

Quatrième étape Marrakech > Casablanca 1179 km dont 445 km de spéciales.

Départ de nuit à 2 h du matin, nous avons 3h45 pour faire 300 km de route de montagne en passant le col du Tizi N’Tichka, il ne faut pas trop traîner.

ES 10 Zagora > Rissani

240 km de piste avec de nombreux oueds et ravines, scratch Heyder-Bruckner Alpine, 3 ème temps. Une anecdote, en arrivant au départ de la spéciale, je constate une effervescence autour de la berlinette de JP Nicolas, deux mécanos s’affairent a changer le joint de culasse !!! A ce moment nous avons une petite demi-heure d’avance et je doute que Jean Pierre puisse repartir dans les délais… A la dernière minute, le moteur démarre, l’Alpine se présente au départ, pendant ce temps là les mécanos jettent les outils dans la R16 d’assistance et partent en trombe à travers des pistes parallèles pour rejoindre JP Nicolas qui s’est arrêté 1 km plus loin. Nous partons de 3 minutes en 3 minutes, Thérier démarre avec la Renault 17 Gordini et s’arrête à 50 m de l’Alpine, à mon tour je démarre et je comprend qu’il faut jouer le jeu d’équipe et je m’arrête également , les mécanos terminent les finitions et JP Nicolas redémarre sans tirer de trop (chapeau les mécanos). Heyder Bruckner qui à loué une berlinette neuve flaire la bonne affaire et double le petit train que nous suivons « sagement » il réalise le scratch mais s’attirera les foudres de J Cheinisse. Il faut saluer l’état d’esprit de JL Thérier qui aurait pu profiter de l’incident pour prendre la tête du Rallye, il n’avait que 20 mn de retard.

ES 11 Rich > Tizi N’Isly

205 km de piste dèja faite dans la 2ème étape, scratch Thérier ( il met 25’ de plus) la fin du rallye approche, il faut ménager la mécanique…4 ème temps, nous restons bien accroché à la 3ème place du général.
Il ne reste plus qu’a rentrer à Casablanca, 270 km a faire en 4heures, les 80 premiers km sont sur une route de montagne étroite et difficiles ( s’est là que nous avons abandonnés l’année dernière). L’équipe Alpine est arrêtée à El Ksiba pour casser la croûte, nous nous arrêtons aussi et au moment de repartir pour 200 km à faire en 2heures, panique à bord de la R17G, la boîte de vitesse est bloquée en 2 ème, maxi 40 km/h, J Cheinisse qui en vu d’autres accroches la R17G à la R16 TS et Thérier suit (obligé) à 140 km/h en débrayant, prière de ne pas relâcher l’embrayage, les 200 km sont avalés à grande vitesse et la R17G est « relâchée » à quelques km de l’arrivée au parc fermé de Casablanca ouf…
Pour nous les émotions seront surtout sur la ligne d’arrivée, la famille, les amis, les officiels et tous les supporters nous attendent avec du champagne. La berlinette est « comme neuve » et prête pour un nouveau départ.

Le lendemain, Alain de Lamarzelle, le Directeur de Renault Maroc recevra l’ensemble du team Alpine-Renault dans sa villa pour un méchoui super sympa. Le soir tout le petit monde du Rallye se retrouvera pour une fastueuse réception pour le remise des prix et accessoirement un chèque de 7500 FF, qui permet de boucler le budget.

 

Cette troisième place au volant d’un mulet de 1600 cm3 derrière deux voitures d’usine pilotée par JP Nicolas et JL Thérier qui sont au top niveau mondial est une grande satisfaction qui nous fait oublier nos petits et grands soucis et constituera un immense souvenir pour un pilote indépendant.
Cette année encore je suis allé sur certaines pistes empruntées par le Rallye du Maroc avec un 4x4 Toyota préparé pour le raid et à certains endroits je me suis demandé comment j’avais pu passer ici avec un berlinette ?

Epilogue :

Alors que cette 3ème place était un bon passeport pour négocier ma participation sur une Renault 17 Gordini pour l’année 1975, un malheureux désaccord financier de dernière heure avec mon copilote ne permettra pas de concrétiser ce projet et la R17G sera louée à François Turco.

Le Tahitien et Geoffroy de Warren sur Alpine A110 1600S Groupe IV Usine N°8

Vous pouvez apporter vos commentaires sur cet article sur le FAR en sélectionnant le message Mon Rallye du Maroc 1974 en Alpine A110 Usine du Tahitien.

 
< Précédent   Suivant >